Prédication des 22 et 23 septembre 2012 (St Paul et Valréas)

Publié le par E.R.F. - Valréas - Saint Paul Troix Châteaux

(Mt27-40)

Culte à St Paul du 22 septembre et à Valréas du 23 septembre 2012.

 

Credo 3 : … Père tout-puissant ...

 

Frère et sœurs,

 

La toute-puissance de Dieu est un attribut de Dieu et nous la comprenons mal. Nous n'en comprenons pas la portée à cause de notre incrédulité et cette toute-puissance nous gêne à cause de la superstition dont il reste toujours une petite trace dans notre cœur.

 

Je voudrais reprendre brièvement ces deux problèmes que nous avons avec la toute-puissance de Dieu : l'incrédulité et la superstition avant d'aller plus loin pour tenter de trouver pour nous le chemin pour confier notre vie à cette toute-puissance.

 

La toute puissance de Dieu est acclamée avec émerveillement d'un bout à l'autre de la Bible : la Genèse célèbre un Dieu qui, à partir du tohu-bohu initial, fait jaillir le monde ordonné et beau.

 

Les écrits de sagesse et de poésie : les Proverbes, le livre de Job, Jonas, les Psaumes ont des mots bouleversants pour décrire la grandeur de Dieu et sa toute-puissance sur le cosmos et tout ce qui vit.

 

Les Écrits historiques, l'Exode, les Juges, les livres des Rois racontent la geste extraordinaire d'un Dieu qui écarte les eaux de la Mer Rouge, donne un enfant à un couple âgé, arrête le temps, sonde les reins et les cœurs, communique des pensées aux souverains lointains, fait parler les animaux.

 

La naissance de Jésus, son œuvre sont des manifestations éblouissantes de la toute-puissance de Dieu : Jésus guérit les malades, il se montre comme le maître de la loi, il apaise la tempête, il revient de la mort à la vie parfaite. Il dit de lui-même en Matthieu  28 : « toute puissance m'a été donnée sur la terre comme au ciel » …

 

Les Actes des Apôtres, les Épitres de Paul et le livre de l'Apocalypse, comme l'histoire de l'Eglise de Jésus, témoignent de cette puissance de vie inépuisable qui est en Christ : les étoiles tombent et Satan s'incline devant le Christ victorieux.

 

Malgré ces témoignages de l'Écriture évoqués rapidement, nous restons incrédules, on mégote avec la toute-puissance de Dieu sans lui accorder notre foi, notre reconnaissance. Nous gouvernons notre vie comme si tout seuls, nous savions et nous pouvions tout  régler !

 

Nous croyons si mal à la toute-puissance de Dieu que nous préférons l'ignorer et nous en passer. Il y a  là une réelle incrédulité de notre part. J'en arrive au deuxième obstacle c'est la superstition.

 

En effet, lorsqu'il nous arrive d'envisager la toute-puissance de Dieu, c'est sous l'angle de notre avantage.  C'est cela la superstition : une sorte de marchandage avec les puissances divines pour capter leur protection.

 

Nous aimerions tous que la toute-puissance de Dieu nous évite,  à nous ou à nos proches, des ennuis, des maladies, des catastrophes. Et lorsque les choses ne se passent pas comme nous l'espérons, notre foi vacille : Dieu nous a trahis, abandonnés. Sa toute-puissance n'existe peut-être pas.

 

Voilà nos deux problèmes : la moitié de notre vie, quand tout va bien, nous vivons comme si Dieu n'était pas tout-puissant, c'est l'incrédulité. Et quand les choses vont mal, nous nous accrochons à une conception fausse et décevante de la toute-puissance de Dieu, c'est la superstition et comme nous sommes éduqués bibliquement, ce sentiment nous fait honte et nous rejetons la toute-puissance de Dieu pour nous débarrasser du problème.

 

Face à ces deux problèmes, je voudrai aujourd'hui tenter de retrouver le chemin biblique, de confesser joyeusement la toute-puissance de Dieu, sans rien renoncer de sa portée, mais sans se tromper sur son objet. Je vous propose pour cela de partir concrètement du passage de la crucifixion lu tout à l'heure.

 

Tout dans ce passage concerne la puissance, ou plutôt la non-puissance de Jésus : il disait qu'il pouvait détruire et pouvait le rebâtir le temple en trois jours … Il voulait sauver les autres et il ne peut se sauver lui-même … Il ne peut pas descendre tout seul  de la croix … Dieu dont il se dit le Fils ne peut rien faire pour lui. Conséquence : ce Jésus est un menteur et un usurpateur, car le voici réduit à l'impuissance.

 

Le problème est ici dans le choc entre la toute-puissance de Dieu et son impuissance manifeste devant le mal.

 

Pour bien me faire comprendre, je vais me livrer devant vous à un petit geste

 

Je suis plus puissant que ce papier journal et je peux détruire la feuille, briser sa résistance d'un coup de poing.

 

Maintenant, face à la paroi de ce mur,  mon poing n'est pas suffisant pour le briser. Le mur est plus puissant que moi et je me heurte à lui avec mon impuissance.

 

Mais si mon poing avait la force et la puissance d'un marteau-piqueur je pourrai entrer dans le mur et le briser, n'est-ce pas ?

 

Ce que je viens de faire par ces gestes illustre le fait que pour briser la mort, pour briser l'impuissance, il faut que Jésus entre dans l'impuissance, il faut que Jésus entre dans la mort.

 

Il est absolument nécessaire pour vaincre la mort d'aller chez elle, d'entrer en elle. Il est inévitable pour Dieu d'entrer dans la faiblesse, pour révéler sa toute-puissance.

 

Si Jésus n'avait pas accepté la toute-faiblesse, il aurait reconnu à celle-ci une puissance formidable, il aurait  reconnu à la mort, au péché, à la bêtise humaine la capacité de lui résister comme le mur a résisté à mon poing. Il aurait donné à la misère humaine la possibilité de vivre sa vie autonome, loin de la toute-puissance de Dieu.

 

Dieu doit assumer en Christ la faiblesse et la mort. Il doit même assumer le péché pour nous en délivrer.

 

Ce que nous avons du mal à comprendre et à accepter, c'est que la toute-puissance de Dieu inclut aussi la toute-faiblesse de notre humanité.

 

Sans cette communion véritable avec notre faiblesse, Dieu serait resté extérieur à nos souffrances et à nos limites. Il ne nous aurait pas sauvés.

 

C'est ainsi que les mots « sauve-toi toi-même, si tu es le Fils de Dieu, descends de ta croix » prennent tout leur sens. Jésus n'est effectivement pas venu se sauver lui-même. Il est venu nous sauver nous et c'est précisément en mourant sur la croix, injurié, abandonné, moqué, qu'il nous sauve de la faiblesse, de la mort et de l'abandon.

 

Depuis cet instant, nous savons qu'aucune injustice n'est abandonnée de Dieu. Nous savons que Jésus agonise avec tous les mourants sans la moindre exception. Nous savons que tous ceux qui souffrent de leur solitude ne sont en réalité jamais abandonnés de Dieu, même s'ils l'ignorent. Dieu se tient là, dans leur ombre, pleurant avec ceux qui pleurent, souffrant avec ceux qui souffrent, mais Dieu se tient là avec tout ce qu'il est, c'est à dire avec sa toute-puissance qui accepte et assume la toute-faiblesse.

 

C'est à ce point précis que l'incrédulité et la superstition de notre cœur basculent vers la foi, la reconnaissance et le changement.

 

Non seulement la toute-puissance de Dieu le pousse à assumer en Christ pour lui-même notre toute-faiblesse, mais surtout, il nous aide à l'assumer nous aussi avec la toute-puissance de Dieu.

 

Les grandes victoires de la toute-puissance de Dieu dans la foi ne sont pas des guérisons spectaculaires, des montagnes qui se déplacent dans les paysages.

 

Les grandes victoires de la toute-puissance sont toujours celles qui assument la toute-faiblesse et le dénuement le plus immense, l'abandon le plus tragique, grâce au Christ : des personnes haineuses qui assument ce qu'elles sont et deviennent sous l'influence du Christ, capables d'aimer, des personnes en train de mourir et qui l'assumant deviennent des témoins de la vie, des personnes d'une timidité maladive qui deviennent capables d'autorité, des personnes martyrisées qui deviennent capables de pardonner à leurs bourreaux.

 

Je l'ai déjà dit, mais il faut le répéter encore une fois : la toute-puissance de Dieu ne s'arrête pas à ce qui nous fait souffrir mais elle l'assume entièrement de l'intérieur : c'est de l'intérieur de la mort, de l'intérieur de l'abandon, depuis l'intérieur de l'injustice, c'est à partir de l'intérieur de la toute-faiblesse que Dieu veut agir en étant présent et peut déployer sa toute-puissance en nous.

 

Paul a résumé cela avec des mots saisissants en Colossiens 2, versets 14 et 15 que je vous relis : « Dieu a annulé l'acte qui nous était contraire ; il l'a enlevé en le clouant sur la croix ; il a dépouillé les puissances et les autorités, et il les a publiquement livrées en spectacle en les enchaînant dans son char triomphal ».

 

Ce passage rappelle les triomphes des chefs de guerre qui entraient dans leur ville sur un char couronnés de lauriers avec, enchaînés à leurs chars, les chefs vaincus. Quelle audace et quel renversement de perspective dans l'image de Paul !

 

Le cortège qui va du prétoire de Pilate jusqu'au mont Golgotha montre en apparence le triomphe des prêtres, des comploteurs, des moqueurs, des puissants et la mort de Jésus couronné d'épines et portant sa croix.

 

Mais en vérité, pour Paul, ce cortège-là, ce cortège de Jésus vaincu, faible, condamné par les hommes, abandonné de ses disciples et de ses amis, est le cortège de la victoire. Aux yeux de la foi, les perspectives sont déjà inversées : Jésus est déjà vainqueur et triomphant et les puissances mauvaises sont vaincues.

 

En entrant résolument dans sa passion, en affrontant notre incompréhension, notre incrédulité, nos peurs et nos superstitions, il entre dans la réalité de notre vie, pour que sa victoire devienne la nôtre aujourd'hui, dans nos propres faiblesses.

 

Amen !

 

Publié dans Prédications

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